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Auteur : Colette Coudé, directrice générale
Parution : Journal Clic Aîné | Volume 2 | Numéro 1 | Février 2021
Il est instructif de recourir à l’histoire an de mieux comprendre la façon dont un sujet a pu évoluer. Cette partie de l’histoire qui aborde les soins réservés aux personnes âgées est assez éloquente. Il suffit de relire le rapport de consultation et de recommandations de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, publié en octobre 2001, intitulé. exploitation_age_rapport-CDPJ.pdf
Nos lecteurs comprendront que la situation des aînés était déjà préoccupante si on en juge par le nombre de pages du rapport (187), de recommandations (48) et d’engagements (4). Mentionnons surtout que le nombre de mémoires (120) témoigne de la grande importance accordée à la situation des personnes âgées.
Étant donné l’ampleur du rapport, la recommandation 37 est celle que nous avons retenue puisqu’elle traite des correctifs à apporter concernant l’hébergement public. Celle-ci attire notre attention quant aux normes de soins et d’hébergement fondées sur les besoins et les droits des personnes. Nous avons également remarqué que la Commission s’est interrogée sur deux points importants. Premièrement, est-ce que l’État devrait définir des normes institutionnelles de vie décente à être respectées par tous les établissements d’hébergement de personnes âgées ? Deuxièmement, quels seraient les principaux critères devant être retenus et, le cas échéant, quels mécanismes de surveillance devraient être mis en place ?
Toujours selon la Commission, la réponse fut unanime et a pu s’énoncer très clairement : « Les normes doivent être établies selon les besoins des résidents et non pas selon les ressources disponibles. »
Il ne fait aucun doute dans notre esprit qu’en observant le contexte de la pandémie de 2021, le manque de ressources pour offrir des soins de qualité à nos aînés, ne date pas d’hier ! Vingt ans plus tard nous sommes encore devant le même constat, à savoir que les soins aux personnes dans nos établissements de soins sont déficients à un point tel que nous ne pourrions pas répertorier toutes les histoires d’horreur qui s’y sont vécues !
En octobre 2001, la Commission, selon les nombreux témoignages reçus, établissait la liste des soins nécessitant des correctifs. Nous ramenons ici ceux qui, à ce jour et à différents degrés, peuvent encore se comparer à la situation de 2001:
-Le respect des droits à l’intégrité, à la sécurité, à la liberté, à la dignité, au respect de la vie privée; l’exercice de ces droits doit comprendre le respect de la personne et de son intimité, ainsi que le respect de ses choix;
-La qualité des soins de santé;
-La qualité des soins d’hygiène;
-La qualité des services pharmaceutiques;
-La qualité des soins nutritionnels et de l’alimentation; la nourriture doit être non seulement nutritive, mais les repas devraient aussi répondre aux goûts, habitudes et diètes des usagers;
-La qualité et l’accessibilité des installations, ce qui doit comprendre un éclairage suffisant et un entretien ménager régulier, particulièrement lorsque les usagers souffrent de difficultés respiratoires, et en général pour prévenir la propagation d’infections;
-La sécurité des lieux et des installations;
-La qualité des relations humaines, ce qui exige entre autres la connaissance de la personne, de ses valeurs, du deuil qu’elle peut être en train de vivre;
-La qualification, la compétence, l’encadrement et le soutien du personnel, notamment par une formation continue, répétée et dynamisante en gérontologie et, dans certains cas, en gériatrie, une rémunération adéquate et la gratification et la stimulation du personnel.
Nous pouvons également noter que quelques participants à la consultation auraient indiqué que le Ministère de la Santé et des Services sociaux a déjà édicté des normes institutionnelles de qualité mais que l’application concrète de ces normes posait problème. Des participants, dont le Protecteur du citoyen, mentionnait que l’approche pratiquée dans de nombreuses institutions ne serait pas fondée sur les besoins des usagers, mais sur des objectifs de gestion.
Alors comment pouvons-nous espérer changer rapidement, maintenant, ce qui persiste depuis 20 ans ? Et combien de temps encore se sera écoulé avant que se pointent de nouveaux rapports et de nouvelles recommandations ? Et combien de temps avant que ne surviennent les failles de la mémoire qui affectent et ont affecté les différents gouvernements qui se sont succédé ces vingt dernières années ?
Oui, nous sommes tous conscients des choix difficiles qui se présentent en matière d’allocation des ressources publiques. Mais est-il possible de croire que la grande leçon que cette pandémie nous crie à tue-tête, est que, plus que jamais, la gestion l’emporte sur les besoins de nos aînés. Cela ne fait qu’entretenir une maltraitance organisationnelle voleuse de vies et dont personne d’entre nous ne veut. Si nous ne voulons pas réécrire la même histoire dans vingt ans ne pouvons-nous pas aimer suffisamment nos personnes aînées en réalisant ce qui doit être fait plutôt que de promettre et de ne pas agir ?